« L’immobilier, une valeur sûre ». La pierre est un roc, un cap, une péninsule sur laquelle on pensait toujours pouvoir compter. Mais, c’était sans prévoir l’apparition du Covid-19 qui a tout emporté sur son passage. Télétravail, click & collect, masque et gel hydroalcoolique, tous ces mots sont entrés dans notre vocabulaire aussi rapidement qu’un éternuement.
Mais, ce virus a-t-il aussi réussi à ébranler le marché immobilier ?
Un pied sur l’accélérateur et un pied sur le frein.
Bref, on ne sait plus bien où donner de la tête depuis ce triste jour de mars 2020. La confiance dans les chaussettes, les Français ne savaient plus s’ils devaient encore se fier à l’immobilier.
Pourtant, contre toute attente, la pierre a fait face, évinçant tant bien que mal les obstacles et les idées reçues. Le grand exode parisien n’a finalement pas eu lieu, et malgré les intempéries, l’immobilier a su mener sa barque.
Après un an de lutte contre le coronavirus, la pierre affiche une belle résistance, mais en sera-t-il de même pour 2021 ?
Rétrospective 2020
Les temps forts
Plusieurs planètes se sont alignées durant l’année 2020 pour le meilleur mais, aussi pour le pire :
- Le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) a mis au point des règles plus strictes. En effet, le HCSF a demandé aux banques en décembre 2019 de ne plus dépasser les 33 % d’endettement et les 25 ans de crédit. En faisant ça, 25 % de la population qui souhaitait obtenir un crédit est sorti du système. Des conditions drastiques surtout dans le neuf.
- Le premier confinement. C’est le nuage noir de cette année 2020. À partir de mars, les Français ne pouvaient plus aller en agences ni faire de visites. De plus, comme d’habitude lors d’une année d’élections municipales beaucoup de permis de construire ont été mis en pause. Résultat : moins d’offre, en particulier dans le neuf.
- Il ne reste plus qu’à signer. Avant dans le neuf il y avait obligation pour le client de passer physiquement chez le notaire. Heureusement, un décret a changé les choses, en autorisant la signature dématérialisée. Problème : quelques soucis techniques ont empêché l’utilisation de ce système à grande échelle.
Toutes ces contraintes rencontrées à partir de mars ont eu un effet sur tout le reste de l’année :
- Les promoteurs ayant moins d’offres ont augmenté les prix.
- Les banques ont délivré moins de prêts (2 fois plus de refus de prêt qu’en 2019).
- ¼ des personnes qui voulaient acheter n’ont pas pu le faire à cause des recommandations du HCSF.
Regain de confiance et idées reçues
À la fin de l’été, les Français reprennent un peu confiance. Le rythme de ventes commence à remonter, le télétravail a bien fonctionné et le marché des SCPI s’est maintenu. Résultat : le marché a gardé un certain dynamisme en fin d’année.
De plus, les banques ont eu de nouvelles recommandations de la part du HCSF en novembre 2020 :
- Le taux d’endettement maximum est passé de 33 % à 35 %
- La durée de prêt maximale est passée de 25 ans à 27 ans.
L’exode des Parisiens n’a finalement pas eu lieu.
Résultat : on se retrouve avec un marché assez dynamique. Alors, certes il y a eu une diminution d’à peu près 10 % des ventes, mais ça n’a pas été la grande dégringolade que beaucoup attendait.
À retenir : contrairement à ce qu’on pourrait penser, le covid n’est pas le seul responsable de la baisse de régime du marché immobilier :
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À en croire les journaux et les chaînes d’informations, la crise allait être catastrophique et allait définitivement torpiller le marché. Mais, comparé à la fameuse crise des subprimes en 2008, ce n’était pas grand-chose.
Rappelez-vous, après la crise de 2008, le marché de l’immobilier avait mis entre 6 et 7 ans à s’en remettre. À l’inverse, en 2020, le marché immobilier n’a mis que 3-4 mois à retrouver ses niveaux de 2018 ou 2019.
Bon à savoir : on peut se référer au cas des SCPI qui est un bon indicateur. La plupart des SCPI bureaux n’ont pas chuté durant la pandémie. De plus, beaucoup d’entreprises auraient pu quitter leurs sièges sociaux et mettre la clé sous la porte. Ce ne fut finalement pas le cas. On se rend compte aussi que les entreprises préfèreront toujours avoir une adresse de prestige pour leurs clients. |
Les aides du gouvernement
L’État a proposé deux options pour les baux commerciaux :
- Soit les bailleurs font payer un loyer à leur locataire
- Soit les bailleurs ne le font pas et ils obtiennent une diminution de leurs impôts.
Malheureusement ce dispositif n’a pas fonctionné. Les Français ont souvent l’image d’un propriétaire qui a beaucoup d’argent et qui possède de nombreux appartement ou maison. Mais, c’est rarement le cas. Le propriétaire s’est endetté pour acheter ce fameux bien, il est obligé de rembourser son prêt et pour cela il a besoin des loyers de son locataire.
Et entre une réduction d’impôt et toucher un loyer, les propriétaires ont choisi : ils préfèrent le loyer, c’est plus avantageux pour eux.
Rappel : Il y a eu des nouveautés en 2020, dont notamment l’élargissement des aides pour la rénovation énergétique. Avant il y avait des conditions de revenus, mais désormais tous les Français, même les plus aisés, peuvent percevoir des aides pour des rénovations énergétiques. |
Sur le marché immobilier en tant que tel il n’y a pas eu tant d’aides que ça de la part du gouvernement :
- Le Pinel a été prolongé, mais ça n’a rien à voir avec le covid
- Les taux de crédit sont restés bas, mais ça n’a rien à voir avec l’État
- Le HCSF à augmenter la durée de prêt et le taux d’endettement à la fin de l’année 2020, mais là aussi ça n’a rien à voir avec l’État
Mais ne soyons pas pessimistes ! Rappelons tout de même que le chômage partiel a été très utile durant la pandémie. Malheureusement ça n’a pas été le cas pour tout le monde … En effet, la plupart des agents immobiliers sont indépendants donc ils ont reçu peu d’aides. Beaucoup se sont retrouvés au pied du mur en mars. La preuve, on a constaté de nombreuses fermetures administratives durant le confinement. Pourquoi ? Car quelques agences immobilières en avaient assez et ont préféré continuer à faire des visites d’appartement même si c’était interdit.
L’année 2020 joue les prolongations
L’assurance emprunteur
Il devait y avoir des changements, mais ils ont été annulés. Aujourd’hui nous avons trois lois qui s’accumulent :
- La loi Hamon : on peut changer d’assurance à paramètres équivalents
- La loi Bourquin : la première année je peux changer avec un préavis de 15 jours
- La loi Lagarde : Après la première année, je peux changer avec un préavis de deux mois à la date anniversaire, sachant que la date anniversaire c’est la date de la signature du prêt.
Ce qui devait être fait : enlever la date anniversaire afin que le client puisse changer d’assurance emprunteur à n’importe quel moment.
Un changement qui aurait augmenté le pouvoir d’achat du client. Ainsi il aurait pu le consommer directement ou l’épargner. Tout le monde était gagnant y compris les assureurs. Les seuls perdants auraient été les banques.
Le prêt à taux zéro
Il a été reconduit jusqu’à fin 2021 avec des conditions un peu plus drastiques.
Selon les revenus qu’on gagne et la composition de son ménage, il existe un barème. Ce prêt à taux zéro peut avoir 3 différés :
- 5 ans
- 10 ans
- 15 ans
Plus on est en bas du barème (moins on gagne d’argent), plus le différé est long. Ce qui permet au début de ne rembourser que le crédit de la banque, donc de rembourser beaucoup de capital. Puis, à la fin du différé (15 ans par exemple), de commencer à rembourser le prêt à taux zéro.
L’avantage qu’on donne aux particuliers avec le prêt à taux zéro c’est de rembourser plus tôt le capital de la banque et donc d’avoir un taux moyen d’emprunt plus bas.
Pourquoi à taux zéro : car il n’y a pas d’intérêts d’emprunt. Dans un crédit normal, chaque mois on rembourse une part d’intérêt et une part de capital. Plus on avance dans le temps, moins on rembourse d’intérêt et plus on rembourse de capital.
Alors qu’avec le crédit à taux zéro, j’ai deux lignes de prêt :
- Une ligne « banque » : par exemple prêté à 2 % sur 25 ans
- Une ligne « taux zéro » (même si c’est aussi la banque), où il n’y aura pas d’intérêt
Exemple : j’emprunte 200 000 euros. 40 % de cette somme (soit 80 000 euros) sera à taux zéro que je ne commencerai à rembourser que dans 5, 10 ou 15 ans selon mes revenus. Donc durant les premières années je rembourserai davantage sur le crédit classique : les 120 000 euros à 2 %.
Résultat : quand on revend à la 7ème ou 8ème année, on a remboursé plus de capital à la banque donc on lui doit moins (c’est plus intéressant). |
2020 : une affaire de sentiments
Qu’est-ce qui qualifie l’année 2020 ? Le mot « sentiment » vient tout de suite à l’esprit. Nous avons navigué de sentiment en sentiment ou plutôt d’idées reçues en idées reçues. La France s’est un peu comportée comme à la Bourse.
Sentiment à part l’année 2020 aurait pu être une excellente année. Ça n’a pas été le cas, mais on n’a pas non plus subi la pire crise immobilière que la France ait connu. On aurait pu faire bien mieux, mais on aurait aussi pu faire bien pire.
Perspectives 2021 : une année de défis et de challenges.
La colocation : effet de mode ?
Il y a un autre effet de mode qui est en train de gagner du terrain dans le marché immobilier : la colocation.
En effet, les Français n’ont plus envie de se retrouver isolés dans de petits appartements comme ils l’ont été durant le premier confinement. On a également pu remarquer que beaucoup de jeunes ont déserté les résidences étudiantes.
Ils ont très envie d’un extérieur. Malheureusement dans les grandes métropoles avoir un extérieur c’est un luxe.
Ils ont donc décidé de faire de la colocation afin de pouvoir vivre dans un plus grand logement avec un extérieur comme un balcon ou une terrasse.
Des entreprises comme « Colonies » ou « Colocatere » ont d’ailleurs augmenté leurs chiffres d’affaires de 30 % à 50 % !
Le marché de la colocation a donc réellement été porté par la crise 2020 et va sûrement continuer à l’être en 2021. Il faut dire qu’entre avoir un petit appartement ancien rien qu’à soi et avoir une chambre peut-être plus petite, mais dans un grand appartement neuf à partager, les Français ont vite fait leur choix.
Pour conclure…
Le premier confinement a eu un effet ricochet. En effet, le marché immobilier n’a fait que réagir à ce premier confinement tout au long de l’année 2020.
Malgré tout, la pierre est restée une valeur sûre.
Pour 2021, nous sommes encore dans l’attente, tout dépend de l’apparition ou non d’un confinement, mais aussi de l’efficacité des vaccins. Mais en attendant, l’État semble jouer son rôle avec la stratégie du « quoi qu’il en coûte » et du chômage partiel notamment.
La preuve, selon un sondage Elabe réalisé pour « Les Échos », Radio classique et l’Institut Montaigne, 71 % des personnes interrogées approuvent le « quoi qu’il en coûte ».
Gardons tout de même à l’esprit que l’année prochaine ce sont les élections présidentielles et beaucoup craignent que rien ne soit fait en 2021. À l’image des maires qui ont gelé les permis de construire avant les élections municipales. Mais 2021 devrait, normalement, être plus simple que 2020. Notamment grâce à des conditions de banques plus accessibles.
Malheureusement ce qui coince c’est l’offre. Les Français veulent acheter, mais les rayons sont vides. Résultat : par sa rareté, le produit devient plus cher et moins accessible. L’État essaye de travailler dessus en facilitant les permis de construire. Un projet permettrait d’ailleurs de donner la possibilité aux préfets de signer le permis de construire lorsque le maire ne veut pas le faire. L’exécutif est pleinement conscient qu’il faut plus d’offres.
Ce sera donc le grand challenge de 2021.
Haut les cœurs, 2021 devrait malgré tout être une bonne année !